François Pratte

Cofondatrice et présidente d’Elo, Catherine Légaré a fondé Academos il y a vingt ans, une solution numérique de mentorat aidant les jeunes à s’orienter professionnellement. Nous l’avons rencontrée afin qu’elle nous entretienne des avantages liés à l’établissement de relations de mentorat entre professionnels, et plus largement de l’importance de favoriser la communication et le réseautage entre les membres d’une organisation comme l’ADGC.

Leader — Nous voyons Elo comme une porte qui donne accès à un lieu d’échanges professionnels sur des sujets qui intéressent les directeurs dans leur quotidien. En fait, qu’est-ce que c’est ?    

Catherine Légaré — Elo est une application web et mobile qui soutient le programme de jumelage de l’Association. Chaque membre peut y trouver son ou ses mentors, voire se présenter lui-même comme un mentor. Elle permet aussi de communiquer facilement entre les membres et d’obtenir du soutien à titre de mentor ou de mentoré.

Leader — Concrètement, comment se fait la prise en main par la personne qui s’inscrit ?                    

Catherine Légaré — Il faut savoir qu’il n’y a rien de compliqué. Ça se fait en quinze minutes. Tout d’abord, elle doit cliquer sur le lien fourni par le secrétariat de l’ADGC pour accéder à la plateforme. Là, elle devra décider si elle s’inscrit à titre de mentor, de mentoré ou les deux. Pour l’aider à créer son profil, Elo lui demandera d’entrer son adresse de courriel, son nom, son occupation et ainsi de suite. Elle sera aussi invitée à résumer son parcours professionnel et à choisir des mots clés qui décrivent son travail, et qui permettront éventuellement à d’autres, dans leurs recherches de mentors ou de mentorés, de la trouver. Aussi, les personnes qui s’inscrivent ont tout intérêt à mettre leur photo sur la page de leur profil. Elles ont plus de chances d’être contactées.

Leader — Nous comprenons que si un membre inscrit recherche un mentor, les mots qu’il choisira correspondront à ce qu’il veut développer, et s’il veut faire profiter d’autres membres de ses forces, il sélectionnera des termes correspondant à son champ d’expertise. Comment se font par la suite les recherches de mentors ou de mentorés ?

Catherine Légaré — Si vous êtes mentoré, vous fouillez dans la banque de mentors, et si vous êtes mentor, vous êtes en position d’attendre de futurs mentorés.

Leader — C’est bien, mais comment les DG, DCDE et DSSD membres de l’Association peuvent-ils profiter pleinement de la plateforme ?      

Catherine Légaré — Lorsque les mentorés recherchent des mentors, les profils suggérés par la plateforme devraient être en lien avec leurs intérêts de développement professionnel. Il est donc conseillé aux personnes qui s’inscrivent d’être précises dans leur description et de bien choisir leurs mots clés. Sur la plateforme, diverses recommandations sont déjà en place pour faciliter son utilisation. J’aimerais mentionner aussi qu’il est très facile, à partir de l’application, de rédiger un premier message à la personne à qui on s’adresse.

Leader — Nos membres sont des leaders dans leurs milieux respectifs. Certains ont un imposant bagage d’expériences de direction alors que d’autres arrivent en poste, mais tous peuvent s’entraider. La plateforme, croyons-nous, facilite la création de liens entre eux.

Catherine Légaré — Oui. Je baigne depuis longtemps dans le monde du mentorat, et ce que je constate et que je lis dans les revues spécialisées, c’est que le mentorat est particulièrement propice quand on doit affronter des situations encore là inconnues, ou quand on se voit confier de nouvelles responsabilités. On crée un réseau d’entraide autour de soi.

Leader — On imagine généralement le mentor, que ce soit un homme ou une femme, comme quelqu’un ayant de nombreuses années d’expérience.

Catherine Légaré — Oui et non. Il faut s’enlever de l’idée que le mentorat n’est donné que par des ressources chevronnées à des jeunes qui débutent dans le métier. En 2021, il y a du mentorat donné par des pairs, et même par des jeunes à des plus vieux.

Leader — En raison des nouvelles technologies ?

Catherine Légaré — Oui, sans compter les nouveaux modes de gestion. Le mentorat qu’on appelle « inversé » — mentor jeune et mentoré plus expérimenté — se voit même dans des entreprises avec des gestionnaires aguerris. Le président de la multinationale GE, par exemple, avait demandé, parmi le personnel de son entreprise, un mentor de moins de trente ans. Il voulait comprendre comment les jeunes fonctionnaient, comment ils voulaient être abordés. Son expérience a été relatée dans de grandes revues spécialisées. Il a témoigné qu’il avait beaucoup appris au contact de sa jeune employée qu’il rencontrait une fois par mois. À tel point qu’au bout d’un an, sa vision de la gestion avait complètement changé.

Leader — Un membre de l’ADGC peut-il utiliser la plateforme pour rechercher un DG, un DCDE ou un DSSD afin de l’aider à résoudre un problème précis, ou à améliorer un aspect particulier de son travail ?

Catherine Légaré — Tout à fait. On peut adopter une approche pour aller chercher un confrère ou une consœur pour des besoins spécifiques, tout comme on peut rechercher un collègue pour nous accompagner de manière plus globale sur une plus longue durée. Peu importe où une personne se trouve dans son développement professionnel ou dans son appropriation de son rôle de leader, elle est sûrement confrontée à des défis ou à des obstacles. Le mentor sert à l’aider et à la guider dans les circonstances.

Leader — Pour nous, l’objectif principal de la plateforme est de favoriser le maillage. Comment répond-elle à ce besoin ?

Catherine Légaré — Notre approche est justement de favoriser les réseaux d’entraide et d’apprentissage. L’idée, c’est de se demander : qui peut m’aider à progresser dans ma carrière ? Une personne d’expérience, quelqu’un qui appartient à un bon réseau, un autre de ma profession qui pourrait m’ouvrir des portes ? Ça dépasse largement la dynamique qu’on imagine de la personne qui transmet le fruit de son expérience à un plus jeune.

Leader — Avec la plateforme, plus on est en contact avec d’autres personnes qui vivent des expériences semblables ou connexes, plus on a envie de créer des liens, de briser l’isolement.

Catherine Légaré — Absolument. Et la beauté de la plateforme Elo, c’est qu’on peut être à la fois mentor et mentoré. D’ailleurs, on constate qu’un grand nombre de personnes font les deux. Elles s’inscrivent d’abord comme mentors, puis en explorant la banque, elles constatent en lisant un profil qu’elles pourraient aussi devenir mentorées. Le rôle de la plateforme est toujours d’aider les personnes à apprendre au contact d’autres personnes. On parle même de micromentorat maintenant, un mentorat de plus courte durée qui ressemble plus à du coaching entre pairs.

Leader — Quelles sont les habiletés ou les qualités exigées pour être de bons mentorés ?

Catherine Légaré — On parle souvent de l’écoute, du savoir-être et aussi d’une notion que j’aime bien : celle du savoir-devenir, qui est la capacité de se projeter dans l’avenir.

Leader — En terminant, quelle est la manière la plus intelligente et efficace de profiter de la plateforme ?

Catherine Légaré — Il est important, après avoir établi une relation, de l’alimenter, de se donner des nouvelles, de s’écrire de temps à autre. Et une rencontre mensuelle, qu’elle se fasse par téléphone ou par visioconférence (ce qui est préférable), est toujours recommandée.